« On nous a dit qu’il fallait aimer son prochain, on ne nous a pas dit comment. » Cette réflexion d’un citoyen congolais que j’ai rencontré lors d’une visite en Afrique des Grands Lacs pour l’ONG Eirene Suisse en dit long et reflète certainement un état de fait dans chaque pays du monde. Le vivre ensemble : un défi tant local que global. L’humanité souffre-t-elle d’une carence d’empathie ?
En Afrique des Grands Lacs, tout comme en Europe, le mépris de celui qu’on ne connaît pas, ou que l’on ne veut connaître prend encore une place trop grande. En découlent notamment toutes sortes de discriminations, ainsi que le manque de considération de l’autre. Partout le même mécanisme: Des clichés simplificateurs permettent de catégoriser en groupe et de généraliser le jugement à l’ensemble du groupe, menant à l’exclusion. A cela s’ajoute ce qu’on ne veut simplement pas voir. Ignorer les sentiments de l’autre peut s’avérer tout simplement plus confortable. Ainsi on se regarde en chien de faïence. Le racisme, en Europe comme ailleurs, semble un fléau indomptable. Face au terrorisme, on parle plus facilement de guerre que de paix. Et pourtant… Comment construire la paix ? Dans les médias, on entend peu ceux qui, à l’image d’un Mandela ou d’un Gandhi, ont poussé des peuples entiers à la réflexion, à une intelligence collective au service du vivre ensemble. Au Nord de l’Ouganda, Omoana compte sur un réseau de leaders de la paix qui tentent d’avancer malgré des blessures d’une ampleur inimaginable : renforcement économique (si possible pour tous), gestion des traumatismes, programmes d’éducation afin de donner des perspectives à la jeunesse… La gravité de la situation nécessite une mise en commun des ressources et des savoirs. Face à la complexité de la bêtise humaine, le partage d’expériences et l’apprentissage commun prennent tout leur sens. Qu’on le veuille ou non, la promotion de la paix nous concerne tous, car personne n’est à l’abri de la violence. Savoir communiquer, surpasser les clivages et prendre en considération les perspectives de l’autre ne sont pas innés. Ainsi, nous nous devons de favoriser les échanges pour laisser la place à la réflexion et l’innovation. Cela concerne les acteurs de la société civile ougandaise, mais pas seulement. L’Europe pourrait en effet également apprendre de ceux qui, à l’image des peuples d’Afrique des Grands Lacs ont été confrontés aux plus grands traumatismes. Prenons donc la mesure des défis qui s’annoncent à nous pour mieux les affronter. Cela ne pourra se faire qu’ensemble. Saisissons cette opportunité!

Adrien Genoud
Président