Contrairement à « mourir de rire » ou « mourir de peur », simples figures de style, « mourir de faim » n’est pas une expression mais une réalité. Dans le monde, un enfant meurt toutes les 5 secondes des suites de la malnutrition et de la faim. Ceux qui en survivent le font au prix de douleurs et de séquelles à long terme.
Outre les nombreuses infections favorisées par un système immunitaire affaibli, la malnutrition a des conséquences à vie sur leurs capacités mentales, cognitives et donc sur leurs perspectives de revenus futurs. Une grande partie des enfants malnutris accueillis à Omoana House ont ainsi été élevés par des personnes qui l’ont eux-mêmes été durant les premières années de leur vie, affectant ainsi leurs capacités mentales, donc leur situation économique et leur sécurité alimentaire, engendrant ainsi un cercle vicieux.

Il serait faux de penser que la faim dans le monde est uniquement un phénomène lointain dû à un manque de ressources des pays du Sud. Cette planète a assez de nourriture pour 10 milliards d’habitants. Comment se fait-il que tant d’enfants agonisent encore de la faim ? Les causes sont multiples. Les plus connues sont la mauvaise gouvernance de certains Etats en proie à la dictature ou victimes de la corruption à large échelle, ainsi que les changements climatiques. Des pratiques axées vers le profit ont également une influence sur la sécurité alimentaire dans le monde. Une partie de la nourriture produite est utilisée pour les agro carburants ou pour nourrir le bétail. L’eau potable, élément indispensable à une nutrition de qualité, n’est pas toujours disponible et parfois privatisée par des géants de l’agroalimentaire. De nombreuses terres des paysans du Sud sont expropriées par des compagnies occidentales, chinoises ou indiennes, pour y implanter des monocultures désastreuses pour l’environnement, au détriment de l’agriculture familiale si nécessaire à une sécurité alimentaire durable. Une pratique ayant ses assises en Suisse joue également un rôle important dans ce désastre. Il s’agit de la spéculation sur les matières premières alimentaires. Des traders basés en Occident achètent des quantités gigantesques de céréales et les revendent à un moment profitable. Ils favorisent la rareté pour que les prix atteignent des montants invraisemblables. Quelle est la conséquence de cette pratique ? Une fluctuation des prix des denrées alimentaires sur les marchés mondiaux, ce qui a des effets désastreux sur la sécurité alimentaire des familles les plus pauvres. Quelle en est l’utilité? Enrichir des traders à Genève et Zurich, et remplir les caisses des communes, cantons et pays qui accueillent de telles compagnies. Une autre utilité ? Simplement une manière de maintenir un système financier commettant l’un des crimes contre l’humanité le plus crasse pour l’enrichissement de certains. Il est à se demander quand le monde se réveillera. Quand considèrera-t-il la faim dans le monde à sa juste valeur, c’est-à-dire un mal à combattre avec la même vigueur que l’esclavage, la Shoah ou l’apartheid? Cela impliquerait de lutter contre chaque cause de ce phénomène.

En février, le peuple votera sur une initiative visant à interdire la spéculation sur les matières premières alimentaires en Suisse. Elle supprimerait uniquement la spéculation financière motivée par les gains à court terme. En revanche, elle ne toucherait pas au commerce direct et aux transactions sur le marché réel, ni aux couvertures de prix, qui eux permettent la stabilisation du système. Certains craignent qu’elle nuise à l’économie suisse. Quoi qu’il en soit, il serait temps de savoir jusqu’où nous sommes prêts à aller pour notre prospérité. Rappelons que, malgré ce que l’on peut dire, la Suisse n’a pas toujours été du bon côté de l’histoire. Il s’agit aujourd’hui de savoir si elle est prête à défendre des valeurs et avoir une vision à long terme. De plus, certaines entreprises ont déjà compris l’impact funeste de la spéculation financière sur les prix des denrées alimentaires et ont pris leurs responsabilités. Ainsi, le fond de l’AVS ou Raiffeisen se sont retirés de ce marché. Cela contredit donc les dire d’Economie Suisse qui prétend que combattre cette spéculation n’aurait aucun effet positif. Le but d’Omoana est de défendre les droits des enfants d’Ouganda, et c’est dans cette optique que nous vous encourageons à vous renseigner sur l’initiative « Pas de spéculation sur les denrées alimentaires » qui sera soumise au vote le 28 février sur : http://stopspeculation.ch .